Pourquoi j'ai quitté les réseaux sociaux

 

Nobody likes me ©iheart

Ça vient d’un simple constat facile à observer ; les réseaux sociaux rendent tristes et cons.

En 2009 avec mes copines Les Chiennes Savantes on adaptait au théâtre La Rage du Sage d’Alain Damasio, un pamphlet politique joyeux et intelligent qui nous propose de résister individuellement aux technococons qui nourissent le capitalisme, en organisant une révolte virale qui vient du dedans (sister resist), le texte en ligne est à lire ici.

J’ai pourtant mis du temps à accepter que j’étais moi-même un citoyen-bulle, avide de mon propre écho. Regarder la vie des autres pour y comparer la mienne et la mettre en scène. Sans être une stalker acharnée je me nourris des feeds, je travaille mes publi comme une vitrine, j’ai une liste de hashtags par thème et je passe du temps à relier mes comptes google-facebook-insta en me persuadant que je ne le perd pas, le temps. Entre exhibo et voyeurisme, je gagne de la “visibilité” aux yeux de ceux qui scrollent mais ne regardent pas. Je pense éviter les influenceuses mais elles me rattrapent dans les algorithmes et là, c’est la guerre des clones version smartphone ; les super-mamans, les super-cuistots, les supers-meufs, plus elles mettent la pression plus je consomme du temps d’écran. Le bonheur compulsif comme norme de vitalité. Se perdre dans la toile et pourtant continuer de la tisser.

Un jour j’emmène mon téléphone aux toilettes, et je me demande où sont passé les magasines et les BD. Le soir il est à côté du lit pour le réveil du matin mais je passe 1h30 à bailler en zappant les stories. Je regarde mon fil d’actu puis je regarde mon fils et je me demande quel modèle je vais donner. Après je découvre aussi les chroniques d’Infernet de Pacôme Thiellement sur Blast qui me mettent la chair de poule.

Alors ça devient une question de cohérence ; les réseaux sociaux ne participent pas à un meilleur vivre, ils m’empoisonnent insideusement car je participe à un système que je ne cautionne pas intellectuellement. Soit je reste dans le déni cognitif, soit je quitte les réseaux. Je réfléchis à des moyens de les remplacer ; m’abonner à des flux rss sur les sites qui m’intéresse, aller voir des expos, des pièces, prendre les programmes papiers des lieux que je fréquente, créer un blog pour communiquer sur mon travail, envoyer une newsletter.

Ma décision est prise, un dernier post sur facebook pour avertir mes 1003 amis et je désinstalle les applis. Je commence le sevrage. Mais ça passe vite et bien, en quelques jours en fait. Aujourd’hui je vis mieux et chaque moment plus longtemps et je réflechis à la suite de la logique. S’extraire du reste, cultiver l’erreur, le beug, tisser du lien avec le vivant. Adieu fac-insta-book, vous ne me manquez pas. Je finirai peut être triste et conne mais pas à cause de ça.